Ces temps-ci, le débat sur le mariage homosexuel, l'adoption par des couples homosexuels et la procréation médicalement assistée fait rage en France. Parmi les arguments contre qu'on entend le plus fréquemment, il y a l'idée qu'un enfant aurait besoin d'une mère et d'un père pour se construire, que sans deux parents de sexe différent, il perdrait – et la société avec lui – tous ses repères. L'idée, donc, qu'un être humain doit se construire dans une différenciation des sexes, en adéquation avec son sexe biologique et en miroir avec l'autre sexe ; la fameuse idée de l'égalité dans la différence, dans la complémentarité.
Il n'y a pas besoin de creuser longtemps cette idée pour voir que, derrière, pointe la notion de rôles masculins et de rôles féminins, constituants de l'identité de chaque personne. Voire que ce – ceux – qui s'écartent de ces rôles n'est pas normal, sain ou souhaitable.
Quels sont donc, alors, ces repères si salutaires que notre société divisée en deux sexes est censée fournir à nos enfants ? Florilège : dans leur plus jeune âge, notre société apprend aux enfants qu'une fille, ça ne crie pas et qu'un garçon, ça ne pleure pas. Qu'une fille aime le rose, les princesses et les fées tandis qu'un garçon aime le bleu, les super-héros et les pirates. Qu'une fille joue dedans, un garçon dehors. Qu'une fille est calme, qu'un garçon se bat pour prouver sa virilité. Quand ils avancent dans les études, qu'une fille est nulle en maths et qu'un garçon a des problèmes en langues. Quand ils sont adolescents, qu'une fille qui a trop de partenaires sexuels est une pute tandis qu'un garçon a intérêt à multiplier les conquêtes. Qu'une fille se destine aux métiers sociaux et aux métiers de soin mal payés et moins gratifiants, tandis qu'un garçon a de l'ambition. Quand ils deviennent adultes, qu'une femme s'occupe de la maison en plus de son travail. Que c'est elle qui s'arrête de travailler et coupe sa carrière pour s'occuper de ses enfants, elle qui va les chercher à la sortie de l'école, qui prend les congés enfant malade et qui assiste aux réunions parents profs. Et quand ils prennent leur retraite, qu'avec sa carrière entrecoupée de grossesses et sa profession moins bien payée, une femme touchera seulement une demi-retraite.
Les voilà, les repères d'une différenciation sexuée et leurs conséquences qui vont avec, ces repères qu'il serait si important de préserver ! La voilà, la société qu'il faut défendre contre cet horrible effondrement des valeurs que constitue la théorie du genre et l'atroce idée qu'il faut laisser les enfants – et les gens en général – libres d'exprimer leur personnalité, qu'elle corresponde ou non à ce que la société imagine de leur sexe.
Moi, je dis : abattons-les, ces repères. Ils gangrènent notre société, ils divisent les hommes et les femmes, ils enferment, ils blessent et ils tuent. Le mariage pour tous menace l'ordre parfait d'une division sexuée – et sexiste ? Tant mieux ! Qu'il le renverse !
Et qu'on remplace la haine par l'amour, la division par l'union, et l'étiquettage systématique des enfants par la liberté !
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