vendredi 11 mai 2012

Hollaback !


Récemment, j'ai découvert le mouvement Hollaback! qui invite chacun-e à témoigner du harcèlement dans l'espace public. Partout dans le monde (en France, en Argentine, en Belgique, au Canada, au Chili, en Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud...), des sites recueillent et localisent des témoignages, très majoritairement de femmes qui se sont fait harceler dans la rue.

L'idée est de permettre aux victimes de harcèlement (principalement les femmes et les membres de la communauté LGBTQ) de trouver du soutien mais également de sensibiliser le plus grand nombre de ce phénomène. Egalement intéressant, le site dénonce des mythes et des idées reçues, notamment sur le plaisir secret des femmes qui se font harceler dans la rue ou encore leur tenue vestimentaire. Enfin, il donne des conseils pour réagir au harcèlement – le sien ou celui d'autres – et pour lutter contre la « participation des spectateurs »

Le harcèlement des filles et des femmes dans la rue est un phénomène tellement courant qu'il m'a fallu longtemps avant de réaliser que ce n'était pas normal et que je n'avais pas à accepter ça. Ca peut commencer quand on a dix ou onze ans et prendre des formes très diverses : des sifflets, des insultes, des regards insistants, des commentaires (positifs ou non, ce n'est même pas la question) sur ses fesses, ses seins, ses cuisses... et puis plus grave, des commentaires salaces, des gestes déplacés, de l'exhibitionnisme, voire des comportements inquiétants (certains suivent la personne qu'ils harcèlent, essaient de la prendre dans leurs bras, de l'embrasser...). Et une fois que ça a commencé, on en a pour des dizaines d'années à se sentir une intruse dans l'espace public. Et on se résigne à se dire que certains hommes sont comme ça et qu'il faut accepter cette situation.

Je ne suis pas d'accord. Quand j'ai découvert ce site, ma première réaction a été : « Bonne initiative, je vais témoigner, moi aussi ! »
Et puis j'ai eu un moment de perplexité.
D'accord, mais qu'est-ce que je raconte ? La fois où un homme s'est exhibé devant moi quand j'avais onze ans, ou celui qui l'a fait à côté de moi dans le métro ? L'homme qui travaillait sur mon trajet de la maison au lycée et qui me harcelait tellement que j'ai du faire un détour pendant six mois ? Les fois où j'aurais voulu être invisible ou discrète comme une souris en passant devant des chantiers ? L'homme qui m'a suivie jusqu'à chez moi discrètement ? Les trois qui ont essayé, après cinq minutes à discuter, de me prendre dans leurs bras et de m'embrasser ? Les dizaines de mecs qui m'ont traitée de pute ou de salope ou m'ont fait subir des remarques toutes plus vulgaires les unes que les autres ? Les jugements sur mes fesses, mes seins, mes hanches, ma taille... ?

On a toutes des histoires comme ça. Les espaces publics, la rue, la nuit appartiennent toujours aux hommes et quand on se risque à envahir un univers qui n'est pas le nôtre, on doit accepter de subir ce harcèlement constant, humiliant et parfois même effrayant. Ca suffit !

Des initiatives comme Hollaback! ne changeront peut-être pas la face du monde ; mais chaque fille, chaque femme qui découvrira en lisant ces témoignages qu'elle n'est pas seule et que ce harcèlement n'a rien de normal ni d'acceptable, chaque passant qui interviendra dans ce genre de situation pour protéger la victime, chaque personne qui réalisera que son comportement dépasse les bornes sera une petite victoire.

Et la prochaine fois qu'on assiste à du harcèlement dans la rue, à nos réactions ! 

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